Est-ce que le fait d’être une fille ou un garçon a une conséquence réelle sur la réussite scolaire ou non ? Peut-être que vous ne vous êtes jamais posé cette question. Parce qu’en soi, on aimerait tous que la réponse soit négative. Et pourtant, les faits sont là : les filles réussissent mieux à l’école (alors que les garçons ont concrètement de meilleurs perspectives de carrières). Pour écrire cet article sur le fait qu’être fille ou garçon influence les apprentissages, je me suis basée sur un article sur ce sujet dans le trimestriel « L’école des parents – n°624 », et sur un article d’Atlantico « échec scolaire : comment les garçons sont trop souvent sacrifiés par l’école« . Vous avez le choix de lire l’article ou d’écouter la version audio.
Les faits : les filles réussissent mieux à l’école que les garçons
On sait (et malheureusement ça n’évolue pas tellement) et on répète souvent qu’à la fin du CM2, en France, près d’un quart des élèves ne maîtrisent pas la lecture. Mais si on regarde un peu plus en détails, on réalise que dans ces élèves, la très grande majorité sont des garçons.
Concernant le baccalauréat, il est là aussi majoritairement féminin : 85,7% des filles âgées de 14 à 24 ans ont leur bac. Contre 71.80% pour les garçons du même âge. Ce qui est assez troublant, c’est de constater qu’il y a 25 ans, pour une même tranche d’âge, les garçons et les filles avaient à peu près le même pourcentage de réussite. Aujourd’hui, l’écart est énorme.
Si on prend tous les élèves considérés en « grande difficulté » ou en « échec », qu’il s’agisse au niveau scolaire (les apprentissages) ou dans le comportement, 80% de ces élèves sont des garçons.
Un dernier fait intéressant, on sait qu’en France, 71% des filles lisent régulièrement, contre 52% des garçons. Et plus les filles grandissent, plus elles augmentent leurs compétences dans les disciplines littéraires.
Pourquoi le fait d’être fille ou garçon a une telle incidence sur la réussite scolaire ?
Alors que certains pays comme la Suède, la Finlande ou encore le Canada tiennent compte du sexe de l’enfant pour adapter la pédagogie (n’en déplaise aux féministes qui considèrent qu’on est tous pareils), en France, nous prenons seulement conscience du fait que la réalité est ce qu’elle est. Mais voir la réalité en face ne suffit pas. Alors essayons de comprendre pourquoi le fait d’être fille ou garçon a tant de conséquences sur les apprentissages et le fait de réussir ou d’échouer à l’école.
- La discrimination commence dès l’école : j’ai été assez choquée et attristée de lire (dans l’article dans « L’école des Parents » – n°624, pages 16-17) quand on a demandé aux professeurs (qui sont pour la majorité des femmes) de dire parmi leurs élèves qui avaient de meilleures notes, que la réponse était sans appel « les filles ». Mais quand on leur a demandé qui étaient les bons élèves, les enseignants citaient des garçons. Pourquoi ? Parce que dans la pensée populaire (et bien bien encrée malheureusement), les filles ont des bonnes notes parce qu’elles s’appliquent et travaillent, alors que les garçons réussissent parce qu’ils sont intelligents. Les garçons sont valorisés alors que les filles sont dépriécées. Triste constat pourtant bien réel.
- Les filles sont plus adaptées aux normes scolaires : les filles sont plus appliquées, travaillent plus, prennent plus au sérieux les cours et les apprentissages. Une tâche scolaire est décomposée en 5 étapes : l’énoncé (l’ordre ou la consigne), l’accomplissement de la tâche, la relecture, la correction éventuelle et la finalisation de l’exercice. Les filles suivent bien plus scrupuleusement ces étapes que les garçons qui s’arrêtent souvent à la 2ème. La majorité des garçons ne vérifient pas et ne corrigent pas, ni ne prennent note de la correction pour éviter de refaire les erreurs la fois suivante. Mais alors on peut se demander pourquoi ? Pourquoi les filles sont-elles plus adaptées aux normes scolaires ?
- Les filles (bien plus que les garçons) aiment le travail bien fait : dès l’enfance, les filles sont plus impliquées que les garçons dans les tâches du quotidien : le linge, le ménage, le rangement, les repas… ce sont des tâches qui sont encore aujourd’hui considérées comme plus féminines et donc faites majoritairement par les mères. Les petites filles sont donc plus impliquées que les garçons dans ces tâches et gagnent très tôt dans minutie et en qualité pour faire du travail bien fait.
- L’identification aux adultes est inégale : les enfants, filles ou garçons, ont besoin de modèles. Les filles vont facilement s’identifier à des femmes accomplies et les garçons à des hommes accomplis. Le problème actuellement est que dans notre société, les filles ont beaucoup plus de modèles visibles que les garçons. Tout simplement parce que la majorité des métiers de l’éducation, des métiers du social, de la médecine, du droit ou encore des agents municipaux sont occupés par des femmes. Ce sont tous les métiers « visibles », en lien avec « l’aide à autrui » ou au « soin ». Ce qui veut dire que les fillettes et les adolescentes ont énormément de femmes à qui s’identifier, et les garçons très peu d’hommes à qui ressembler. Dans ce contexte, il est beaucoup plus facile pour une fille de s’investir dans son cursus scolaire et de choisir sa voie professionnelle que pour un garçon. Ce qui a plusieurs risques : le premier, c’est que certaines filles ne vont s’identifier qu’aux femmes rencontrées et donc limiter leurs possibilités. Le deuxième, c’est que les garçons vont exclure ces métiers de leurs possibilités parce qu’ils vont l’associer aux femmes.
- Le garçon oppose sa virilité au système scolaire tout entier : c’est inconscient bien sûr, mais cela a plusieurs explications. Tout d’abord, le garçon évolue dans un monde principalement féminin et cherche sa place. Deuxièmement, alors que la fille a un passage très clair de sa position de fille à femme de par l’apparition de ses premières règles (et donc sa capacité physique à enfanter), le garçon n’a pas de passage intitiatique (qui était matérialisé en France avant avec le service militaire, et dans d’autres sociétés par un rituel religieux ou autre). Le garçon cherche donc à sortir de l’enfance en se rebellant, en s’opposant, en devenant parfois violent. Il faut savoir aussi que le « grand » de CM2 devient le petit de 6ème alors même qu’il cherche à prouver qu’il est grand. Pour ce passage dans le monde des grands, le jeune garçon a l’impression que sa virilité n’est pas compatible avec la soumission aux exigences scolaires. Comme si être assidu, attentif, respectueux et appliqué était un signe de faiblesse, réservé aux filles.
Quelles solutions ?
Vous me connaissez assez pour savoir que lorsque j’aborde un sujet sur le blog, l’idée n’est pas juste de constater, mais aussi d’apporter sa petite pierre à l’édifice. Alors j’espère que ces quelques pistes sauront aider les garçons à trouver leur place, les filles à avoir de l’ambition et des projets en accord avec leurs réels souhaits, et tous les enfants à se respecter et à respecter les autres.
- Ne pas se voiler la face : accepter que c’est une réalité et qu’on a sûrement nous aussi, à notre niveau, participé à la transmission de certaines pensées ou certains préjugés. On ne se flagelle pas pour autant, on peut changer les choses maintenant 🙂
- Le travail bien fait est une valeur à transmettre et à communiquer. Ce n’est pas un mode domestique réservé aux filles. C’est quelque chose de noble que les garçons, comme les filles, sont encouragés à viser. On peut trouver des exemples de travaux réalisés avec minutie, patience et expertise : certains par des hommes, d’autres par des femmes. Pour montrer que c’est une valeur et une qualité qui n’a rien à voir avec le sexe.
- N’émettre aucun jugement de valeur. Un garçon a le droit d’aimer le rose, d’avoir une belle écriture, d’aimer lire et d’avoir de bonnes notes en classe. Il n’est pas un fayot. Une fille a le droit de vouloir être footballeuse et d’être bien plus douée en sport qu’en français. Les goûts de chacun sont à respecter et je dirais même plus, il faut encourager chaque enfant à s’aimer tel qu’il est et à être fier de qui il est et de ses goûts.
- Ne pas banaliser la désinvolture. Ne pas la cautionner non plus. On ne s’en fiche pas quand une règle n’est pas respectée et qu’elle gêne autrui. Ce n’est pas plus normal un garçon qui vient sans ses affaires de travail qu’une fille. Ce n’est pas plus normal un devoir qui a l’air d’un torchon s’il vient d’un garçon plutôt qu’une fille. L’idée n’est pas de chercher la perfection, mais d’être juste et équitable et d’attendre la même application et implication des garçons que des filles, que ce soit à la maison ou à l’école.
- Favorisons les beaux projets, les beaux rêves et les belles ambitions. Bien sûr, une petite fille peut avoir envie de faire une grande carrière dans la mode à 11 ans, et être heureuse et épanouie à la maison avec sa fille quand elle aura 30 ans. Il n’y a pas un métier meilleur qu’un autre, une façon de vivre plus épanouissante qu’une autre. Ce qui est positif pour quelqu’un ne l’est pas forcément pour un autre. Donc on pousse chaque enfant à se donner les moyens pour atteindre ses objectifs, ses rêves. On ne les juge pas, on ne les critique pas, on ne se moque pas, on ne dit pas que c’est impossible. Chaque enfant mérite d’avoir le choix et d’être fier de ce choix.
- Offrir les meilleurs bases possibles en lecture et en écriture. Une mauvaise lecture est la première source de l’échec scolaire. S’il y a un apprentissage sur lequel on ne peut pas abandonner c’est celui-ci. Peu importe le temps que ça prendra, il faut absolument laisser l’enfant consolider cette base. Et que ce soit au Canada ou en Suède, les méthodes et les projets pédagogiques autour de la lecture ne sont pas les mêmes selon les garçons ou les filles. On encourage les pères à lire avec leurs fils pour que les garçons s’impliquent dans la lecture qui n’est pas réservée aux filles.
- Trouver une façon de faire passer le garçon vers l’âge adulte au-travers d’un rite. Avant, le garçon était apprenti très tôt, apprenait le métier avec son père et était responsabilisé dans son travail (au champs, ou travail manuel). Aujourd’hui, c’est un peu plus compliqué mais on peut permettre à l’enfant d’avoir une sorte de rite de passage vers 13 ans avec à la maison des tâches bien spécifiques réservées habituellement aux adultes. L’idée est de montrer au garçon ce que ça implique de devenir adulte : être responsable, faire les meilleurs choix possibles, assumer les conséquences de ses actes… On peut aussi faire une fête, et augmenter l’autonomie et la responsabilité de l’enfant.
- Orienter TOUS les enfants (peu importe leur sexe) pour leur futur et leur permettre de s’identifier. Ce qui implique de présenter les différents métiers autant par des femmes que par des hommes pour que les garçons ne se disent pas « ça c’est réservé aux filles », et que les filles ne se disent pas « j’ai le choix uniquement parmi les métiers principalement féminins ». Les garçons ont besoin de modèles masculins dans les métiers du soin, du droit, de l’enseignement. Les filles ont besoin de modèles dans les métiers techniques, technologiques et de la finance.
Et voilà encore un article qui se termine, avec toujours la possibilité pour vous de donner votre avis dans les commentaires et de dire si vous voyez d’autres éléments qui vous semblent importants ! Merci d’avance pour votre participation si chère à mon coeur <3