Il y a quelques semaines, je passais l’après-midi avec ma mère, ma fille et une partie de mes nièces et neveux dans un parc à Grenoble. Pendant que les enfants jouaient, je discutais avec ma p’tite maman, infirmière scolaire. Le sujet est venu sur les troubles dys, et la discussion était vraiment très enrichissante. Avoir son regard d’infirmière scolaire sur la manière dont on peut diagnostiquer certains troubles (ou passer à côté), sur les aménagements pour ces élèves, sur ce que ça apporte à long terme à ces enfants et à leurs familles… Tout était tellement naturel dans la discussion que je n’ai pensé ni à prendre des notes, ni à sortir mon micro et dictaphone pour enregistrer tout ça (peut-être que ça aurait stoppé net la discussion ceci dit, de savoir que c’était enregistré). Quoi qu’il en soit, l’autre jour à la médiathèque, je lisais le magazine « L’école des Parents – n°624 », dans lequel il y a tout un dossier sur les troubles dys. J’ai alors pu faire le point et le lien entre ma discussion avec ma mère et certains des éléments de ce dossier. Et me voilà avec un article sur le sujet (que vous pouvez écouter au format audio en cliquant sur play juste en-dessous), qui j’espère vous permettra d’y voir plus clair, et peut-être, qui sait, de découvrir ces enfants sous un nouvel angle.

 

 

Les troubles dys, qu’est-ce que c’est ?

« Dys », en grec, signifie « handicap ». On pourrait simplifier les choses en disant « dys » comme « dysfonctionnement ». Les troubles se situent au niveau du cerveau et entraînent des dysfonctionnements au niveau de la mémoire, un ralentissement de la pensée ou de la perception, ou encore des difficultés à résoudre des problèmes. Donc il n’y a pas de trouble neurologique ou intellectuel (la personne n’est pas « moins intelligente qu’un autre »). Les troubles dys ne sont évidemment pas universels, dans le sens où chaque personne est unique et aura des difficultés qui lui sont propres. Cependant, on peut réunir plusieurs familles :

  • La dyslexie : c’est le trouble le plus connu et le plus reconnu. Une personne dyslexique a du mal à identifier les lettres, les syllabes et les mots. Les dyslexiques ont dont beaucoup de mal à lire et à comprendre un texte.
  • La dysorthographie : c’est le fait d’éprouver des difficultés à écrire à cause d’un problème de la maîtrise de l’orthographe. Les dysorthographiques ont du mal à passer du son (le phonème) à la transcription écrite de ce son (le graphème). L’écriture spontanée et la dictée sont toutes les deux affectées.
  • La dyscalculie : ici, les personnes atteintes de ce trouble ont du mal à manier les chiffres, à résoudre des calculs et des problèmes de logique.
  • La dyspraxie : ce trouble concerne la gestuelle. Une personne dyspraxique doit énormément se concentrer et être attentive pour effectuer des gestes de minutie ou de précision, qu’une personne lambda ferait automatiquement et sans réfléchir. Ce qui conduit souvent ces personnes à être maladroites et malhabiles malgré beaucoup d’efforts.
  • La dysgraphie : c’est un cas de figure de la dyspraxie qui concerne le geste d’écrire. Une personne dysgraphique a énormément de mal à écrire (non pas à cause de l’orthographe) mais du geste en lui-même. Donc pour écrire, la personne est très lente car doit beaucoup se concentrer, et souvent, épuisée, finit ses phrases et on n’arrive pas à la lire.
  • La dysphasie : « mauvais langage » ou « parole difficile » en grec, ce trouble concerne le langage oral. Une personne dysphasique peut avoir du mal à comprendre et/ou à parler dans sa langue maternelle (et à fortiori dans les autres langues plus tard) alors qu’elle n’a aucun problème de surdité.

Je vous ai présentés ces différents troubles et j’aimerais rajouter quelques précisions qui me semblent importantes.

  1. Ce n’est pas parce qu’un enfant a du mal avec un apprentissage qu’il a forcément un trouble dys. Par exemple, un enfant peut avoir des difficultés en maths sans être dyscalculique… Il faut faire attention à ne pas vouloir à tout prix coller une étiquette « dys » sur un enfant qui a juste des difficultés d’apprentissages qui peuvent être liées à tellement d’autres choses (ne colle pas au système, rencontre des difficultés dans sa famille, a des problèmes émotionnels…).
  2. Je suis convaincue que le système scolaire classique actuel accentue les troubles dys. Je suis persuadée que certains troubles ne seraient ni handicapants, ni dévalorisants pour l’enfant qui les porte, s’il avait la possibilité d’aller à son rythme depuis son plus jeune âge, et s’il avait la possibilité de consolider les apprentissages dans lesquels il a le moins de facilité. Donc je ne dis pas que les troubles dys n’existent pas dans les écoles démocratiques, Montessori ou chez les enfants instruits à la maison. Mais je pense que même s’ils existent, cela n’est pas forcément handicapant (sauf cas de trouble grave, ce qui peut arriver), parce que l’enfant apprend très tôt à connaître ses faiblesses et ses forces, et gagne en assurance et en confiance en lui s’il a le temps d’aller à son rythme.

 

Le diagnostic d’un trouble dys

J’en reviens à ma discussion avec ma mère. Elle me disait qu’à force de discuter avec des collègues, elle voyait clairement la différence selon les établissements scolaires, entre ceux où les enseignants sont avertis et formés pour reconnaître ces troubles, et ceux qui ne le sont pas. La différence a des conséquences importantes parce qu’un enfant pris en charge tôt a beaucoup plus de chances de regagner en confiance en lui et de s’améliorer grâce aux soins qui lui sont adaptés. Alors que beaucoup d’enfants sont juste catalogués comme « fainéants » ou « mauvais élèves », ou encore « ne font pas d’effort »…

Les différents symptômes associés aux troubles dys sont la lenteur, la difficulté à mémoriser, à rester attentif, le fait de faire beaucoup d’erreurs, et les mêmes, la fatigue (engendrée par les efforts incroyables non visibles de l’enfant), et les mauvais résultats (l’échec scolaire). Alors ça ne veut pas dire que parce qu’un enfant présente ces symptômes il est forcément dys. Ce sont juste des signes à observer.

Le diagnostic d’un enfant dys passe par :

  • Les parents, qui décident de chercher et de comprendre, mais peuvent s’épuiser pendant des années avant de trouver quelqu’un qui saura les renseigner (quand ils trouvent).
  • Les enseignants, qui sont de plus en plus formés à ça, mais malheureusement, sur le territoire, cela reste une minorité : en tous cas, quand ils sont formés, ils remarquent facilement les enfants qui ont un profil différent et qui pourraient être accompagnés. Ce sont donc souvent les enseignants qui proposent aux parents de faire faire un bilan à l’enfant (qu’il s’agisse d’un trouble dys, d’un enfant à haut potentiel ou autre).
  • Les professionnels : orthophonistes, orthoptistes, pédopsychiatres, ergothérapeutes… tous ces professionnels peuvent être consultés en cas de doute, ne serait-ce que pour écarter la piste du trouble. Mais si le trouble dys est avéré, la prise en charge va permettre à l’enfant d’améliorer son présent et d’envisager un meilleur avenir. Il faut savoir qu’on ne guérit pas d’un trouble dys (le dysfonctionnement au niveau cognitif reste), mais on améliore. Et plus c’est pris en charge tôt, meilleurs sont les résultats.

 

La souffrance ressentie par l’enfant dys et sa famille
Avant le diagnostic :
  • La souffrance de l’enfant dys : Il est découragé car il fournit énormément d’efforts de concentration et d’attention par rapport aux autres, mais le résultat est médiocre, voire nul. Il ne comprend pas, il pense qu’il est bête, il se dévalorise, il perd confiance en lui puisqu’il n’atteint pas ses objectifs, puisqu’untel bien plus jeune que lui y arrive mieux. Il a aussi honte de décevoir (son enseignant, ses parents…) et peut baisser les bras. L’échec scolaire peut aussi entraîner des troubles du comportements car l’enfant ne sait pas gérer son sentiment d’injustice, il fait beaucoup d’efforts, ce qui le fatigue mais ne produit aucun résultat, donc il se met en colère et peut devenir violent dans ses actes et dans ses mots.
  • La souffrance de la famille : Les parents sont déçus, ont des regrets et culpabilisent. Ils se sentent incompétents et ne comprennent pas pourquoi malgré tous leurs efforts, leur enfant échoue. Ils se sentent démunis, impuissants, et vraiment inquiets pour l’avenir de leur enfant, au point d’angoisser. Certains vont mettre encore plus la pression à l’enfant en disant qu’il ne travaille pas assez, d’autres vont vraiment penser que leur enfant est bête et se résigner. Quand un parent réalise qu’il y a un problème mais qu’il ne sait pas lequel et qu’il ne trouve pas comment aider l’enfant, c’est terrible.

 

Après le diagnostic :

Au début, le maître mot est « soulagement ». On comprend enfin. L’enfant réalise qu’il n’est pas plus bête qu’un autre. Bien sûr, il va falloir reconstruire sa confiance en lui, mais il y a solutions. Les parents sont soulagés de savoir enfin comment aider.

Après, il y a d’autres sentiments qui vont apparaître. Parfois, malgré une ou deux séances par semaines avec des professionnels, les résultats ne sont toujours pas au rendez-vous. Parce qu’il faut beaucoup de temps. Et certains peuvent être frustrés de voir l’investissement et le peu de résultat. L’enfant peut ressentir une opposition entre l’autonomie qu’on veut l’aider à acquérir au-travers des soins et des aménagements, et toute l’aide mise en place pour lui, justement, qui le fait se sentir encore plus différent. Toute la difficulté est donc d’accepter (la situation, le trouble), sans renoncer.

Ensuite, si l’enfant dys a des frères et soeurs, ceux-ci peuvent éprouver de la jalousie pour ce frère ou cette soeur dys qui a toute l’attention de leurs parents.

Enfin, l’enfant peut aussi se sentir réduit à cette étiquette de « dys ». Attention à ne pas limiter l’enfant à son trouble. Il est aussi (et surtout) tout un tas d’autres choses 😉

 

Du soin pour un enfant dys

Une fois que l’enfant a été diagnostiqué et qu’il est suivi par les personnes adéquates qui sauront l’aider à leur niveau, les parents et les enseignants peuvent eux aussi aider. Comment ? Voici quelques pistes :

  • Valoriser les réussites et LES EFFORTS même si les résultats ne sont pas à la hauteur des efforts.
  • Mettre en place un PAP : le Plan d’Aménagement Personnalisé est un aménagement pédagogique qui permet à l’élève de suivre le programme tout en ayant des aménagements spécifiques à ses troubles.
  • Diminuer la quantité ou la difficulté de travail : par exemple, un enfant dyscalculique n’aura que 3 exercices sur 5 à faire, parce qu’il vaut mieux qu’il prenne son temps et qu’il soit attentif et concentré sur moins d’exercices, et qu’il les réussisse.
  • Proposer des exercices où l’enfant devient le correcteur : l’enfant renverse la situation, il n’est plus celui chez qui on traque les fautes, il est celui qui détecte les erreurs de l’autre. C’est une façon de faire travailler l’enfant autrement, en jouant. Par exemple, un enfant dysorthographique peut se trouver face à un petit texte où il y a 5 fautes, il doit les retrouver.
  • Donner plus de temps pour lire et faire les exercices : attention, cela ne veut pas dire qu’il faille donner 30 minutes de plus à l’examen qu’aux autres, parce que cela ne peut que épuiser l’enfant. Il s’agit plutôt de laisser plus de temps pour lire l’énoncé ou le texte, et de poser moins de questions, mais que l’enfant ait le temps de tout comprendre pour répondre par exemple.
  • Proposer des textes aérés et écrits en grands : certains enseignants, pour ne pas stigmatiser les enfants qui ont besoin de ce genre de supports, n’utilisent plus que des polycopiés en format A3 avec des textes écrits en plus gros et plus d’espace entre chaque paragraphe. Les élèves qui n’ont aucun trouble ne sont pas gênés d’avoir ces textes en gros, et ceux qui ont des troubles sont aidés sans être « ceux qui font différemment ». Je trouve ça super chouette comme initiative.
  • Proposer de moins écrire : un enfant dyslexique va passer plus de temps à lire et aura moins de temps pour répondre aux questions. Un dysorthographique va mettre énormément de temps à écrire et ne pourra pas répondre à toutes les questions. Un dysgraphique aura encore plus de mal à écrire. On est dans une société où l’écrit est sacralisé au détriment de l’oral. Alors l’idée, ce n’est pas de supprimer l’écriture (qui a son importance), mais de permettre à l’enfant d’apprendre et d’avancer en écrivant moins pour qu’il souffre moins. On peut donc proposer certaines questions avec des cases à cocher, des items à entourer, des éléments à relier ou à rayer, pour moins écrire. On peut aussi proposer des dictées à trous. Et enfin, pour les cas vraiment extrêmes, proposer un ordinateur (parce que le geste de tapper sur un clavier est beaucoup moins douloureux et épuisant que d’écrire).
  • À la maison on peut classer les matières en 3 catégories : celles où l’enfant réussit (on le laisse être autonome et gérer pour qu’il voit qu’on lui fait confiance), celles où ses résultats sont moyens (on peut l’aider ponctuellement quand il a besoin), et celles où il a de grosses difficultés (on l’aide au maximum pendant ses devoirs, on lui laisse le temps nécessaire).
  • On ne surcharge pas l’emploi du temps de l’enfant : on lui propose des pauses régulièrement, des temps où il peut se défouler physiquement, décompresser et avoir des moments relax.
  • On propose plein d’autres activités : manuelles, créatives, artistiques, musicales, sportives… pour ne pas sans cesse rappeler à l’enfant son trouble, et lui montrer qu’il peut s’épanouir, apprendre, se réaliser et faire plein d’autres choses sans aucune différence avec les autres enfants.
  • On barre les objectifs au fur et à mesure : pour visualiser l’avancée. On le fait pour les devoirs, mais aussi pour les leçons comprises selon le programme de l’année par exemple.
  • On prévoit des timings assez courts : 10 à 20 mn maximum. L’effort est énorme, il ne faut pas trop en demander d’un coup.
  • On l’aide à s’organiser : pour aider l’enfant on lui permet d’avoir un espace rangé et organisé, avec des cahiers précis pour chaque chose, un matériel rangé toujours au même endroit. On prévoit aussi un temps chaque jour pour les devoirs ou les leçons, avec une sorte de routine qui permet à l’enfant de prévoir et de visualiser sur sa journée les moments de travail et le reste.
  • On joue : beaucoup. Parce que le jeu permet de développer de nombreuses acquisitions en s’amusant, l’air de rien. J’ai déjà détaillé tout ce qu’on peut apprendre grâce aux jeux de société ici. Mais il y a aussi les jeux de contacts, les jeux sportifs, les jeux en plein air, les jeux en solo, les jeux de stratégie…
  • On aime : sans condition, sans résultat, sans pression, sans attente. Un enfant qui est aimé gagne en confiance en lui et forcément, vit mieux sa situation. L’aimer, c’est l’aider 🙂
  • Proposer la présencer d’un(e) AVS : l’Auxiliaire de Vie Scolaire a pour mission d’accompagner les élèves qui ont des difficultés scolaires (ainsi que les personnes en situation d’handicap). Un(e) AVS peut s’occuper d’un ou de plusieurs enfants en même temps, et parfois, selon le trouble dys, sa présence est un vrai +.

Les parents aussi ont besoinde soins, et peuvent participer à des groupes de paroles, ou demander de l’aide auprès d’un psychologue / psychiatre.

 

Quoi qu’il en soit, peut-être que vous avez vous aussi d’autres pistes qui ont été mises en place pour vos enfants et qui les ont aidées ? Partagez-les pour aider les autres parents qui font face depuis peu à cette situation. J’espère que cet article vous aura aidé.

 

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