Lors de nos déplacements en camping-car (notre maison roulante), j’ai la chance de pouvoir vous faire découvrir des projets de vie qui partent du cœur. Aujourd’hui, j’aimerais vous présenter Lauranne Saliaris qui a mis des années à trouver ce qu’elle voulait vraiment faire. Elle a fait des études par dépit, enchaîné des petits boulots, jusqu’à tomber « par hasard » (si on croit au hasard) sur ce qui a fait sens pour elle. Elle a trouvé sa voie à plus de 30 ans. Au-travers de cette interview, je souhaite vous communiquer l’envie de multiplier les expériences jusqu’à trouver ce qui vous correspond, ce qui vous fait vibrer ! Peu importe votre âge 😀

Je vous laisse découvrir ce témoignage au format vidéo ou texte (juste en-dessous).

Quel est ton parcours scolaire ?

Très alambiqué. Pour faire simple, j’ai fait un bac A2 (trois langues vivantes et philosophie : anglais, italien, espagnol). J’ai longtemps hésité avec un bac A3 (arts plastiques), j’étais douée en dessin mais sans réelle passion, mais il aurait fallu changer de lycée, donc de copains, donc j’ai choisi les copains et A2.

Après le bac, j’ai commencé une année de fac LEA (langues étrangères appliquées) que j’ai abandonnée en cours d’année. J’ai fait des petits boulots pour finir l’année scolaire, puis je suis partie en tant que jeune fille au pair pendant un an en Angleterre.

Quand je suis revenue, j’ai fait un BTS secrétariat trilingue (anglais, italien). Puis je suis retournée à la fac et je suis rentrée directement en licence, à nouveau en LEA pour être traductrice. Puis une nouvelle idée : devenir institutrice. J’ai passé le concours d’instit, quatre fois. J’ai été quatre fois admissible mais j’ai à chaque fois échoué aux oraux. Par manque de confiance en moi. Ça a été très dur parce que je savais que j’étais faite pour cela, que j’avais les compétences, mais j’étais très facilement « destabilisable » durant les oraux. Pendant ce temps j’ai enchaîné les petits boulots.

Je n’avais pas de projet réel. Je ne savais pas quoi faire alors je suis allée au plus simple : j’étais douée en langues en faisant peu d’efforts donc j’ai choisi cela. Mais je n’avais pas d’envie, pas de passion.

D’où est venue l’idée de faire de la céramique ?

J’ai trouvé un travail de formatrice en anglais en 1998 dans un centre de formation d’apprentis à Marseille. J’intervenais auprès de CAP tourneurs et décorateurs en céramique. Je ne m’épanouissais pas dans mon travail. Je l’avais accepté parce que j’avais besoin de travailler mais ça ne m’intéressait pas.

Je voulais faire un métier manuel, j’ai vu les jeunes faire avec la poterie et je me suis dit « pourquoi pas ? » J’ai fait un dossier pour me former 9 mois et entamer une reconversion professionnelle. Au mieux, ça me plairait. Au pire, j’aurais fait autre chose pendant 9 mois. Je n’avais jamais mis les mains dans la terre mais ça m’a plu. J’ai fait la formation « tourneur en céramique » en 2001. J’avais plus de 30 ans.. Il y aurait eu une section « ébénisterie » j’aurais peut-être été ébéniste. Il fallait que je travaille avec les mains. Le coup de cœur est venu après.

As-tu eu des difficultés à devenir artisan à ton compte ?

À la fin de ma formation j’ai démissionné, c’était clair que je voulais m’installer à mon compte. Après les 3 mois de carence, j’ai touché mon chômage pendant 2 ans. J’ai utilisé ces deux années pour créer ma gamme (mon style, la terre que j’utilise, mon décor, mon émail…).

Je n’ai eu que des facilités : les conseillers pôle emploi savaient que j’avais un projet et me laissaient travailler. J’ai bénéficié de l’ACRE donc j’ai été exonérée de charges pendant un an. J’avais un local prêté par ma belle-mère (son garage). Pour l’achat du matériel, mon père nous a prêté de l’argent (notamment le four qui a coûté plusieurs milliers d’euros). Et par-dessus tout, Serge (mon mari) m’a soutenue.

Comment est ta vie de céramiste, aujourd’hui ?

Sur l’année, de manière générale, c’est un train-train comme tout un chacun : chaque semaine s’organise entre l’atelier chez moi (le lundi, mardi, jeudi et vendredi), les cours que je donne en céramique à des enfants et à des adultes (le mercredi et le jeudi en fin de journée), l’école pour ma fille, les devoirs, etc.

Pendant la saison des marchés, c’est plus aléatoire. C’est essentiellement l’été mais aussi un peu au printemps : il n’y a plus de cours, et je pars plusieurs jours, souvent les week-ends, pour vendre mes produits dans la région PACA et les régions limitrophes. Ça casse le rythme et en fin de saison, on est souvent crevés.

Que veux-tu transmettre aux enfants ? À ta fille ?

Aux enfants, un savoir-faire, des techniques, développer leur imaginaire. Un petit peu la politesse aussi, de temps en temps. En réalité, les enfants, mais même les adultes, me transmettent souvent plus que ce que je transmets. Même techniquement, ils me challengent, apportent un regard neuf.

Quand j’étais jeune, contrairement à mes frères et sœurs, je ne savais pas ce que je voulais faire. Ce qui m’a manqué et que j’aimerais apporter à ma fille Jeanne, c’est d’être boostée, poussée. Si on m’avait imposé des choses, ça m’aurait peut-être mis des claques. J’aurais aimé être plus accompagnée là-dedans. C’est difficile de faire des choix et j’aimerais accompagner Jeanne dans cela. Je veux l’encourager dans ce qu’elle a vraiment envie de faire, qu’elle aille au bout (même si c’est difficile, même si c’est pas le choix des copains). Qu’elle fasse ce qu’elle aime vraiment.

Qu’est-ce qui te plaît le plus dans ton métier de céramiste ?

Faire. Là où je suis la plus à l’aise, c’est dans mon atelier. J’adore tourner et faire le décor. Au même niveau. Ce que j’aime le moins c’est l’émaillage.

Il y a plusieurs phases, comme la phase de vente, de communication. Le contact, ça va, j’ai de très bons contacts avec ma clientèle mais j’ai du mal à mettre mon travail en avant. J’ai souvent peur de gêner.

Un petit tour des étapes de création ?

  1. Le gros de mon travail c’est du tournage : les tasses, les bols, les vases, les saladiers, sur mon tour. Il y a quelques pièces que je façonne par moulage (des plateaux en général).
  2. Je mets tout sur une planche et je fais sécher (selon la météo) un certain temps pour atteindre la consistance cuire. Entre le très humide et le sec.
  3. Après je reprends mes pièces sur le tour pour gratter, faire un joli pied, reprendre quelques détails. C’est le tournasage.
  4. Ensuite, je passe mon engobe noire. C’est une terre que je transforme et que je passe au pinceau. C’est ma couleur de base qui fait marron avant cuisson.
  5. Je sgraffite, c’est la phase du décor. Je décore mes pots avec des outils qui permettent de gratter l’engobe pour faire apparaître les motifs, les dessins. C’est une technique de décor, il y en a plein d’autres.
  6. Ensuite je laisse sécher entièrement, puis j’enfourne quand il est plein. La première cuisson s’appelle la cuisson de biscuit : 8 heures de cuisson puis 24 heures de refroidissement. Le marron devient un peu chocolat.
  7. Ensuite, c’est l’émaillage (composé de verre). J’ai des émaux colorés que je fabrique qui sont transparents et brillants. C’est ce qui donne aussi l’étanchéité de la pièce pour la faïence et qui rend la céramique douce et lisse en bouche pour de l’utilitaire.
  8. Deuxième cuisson, d’à peu près la même durée que la première. Le produit qui sort est alors fini et prêt à être vendu.

Pour conclure, qui aimerais-tu remercier dans ton parcours ?

Je n’aurais pas fait ce parcours-là sans mon mari qui m’a soutenue, aidée. Pourtant il y a eu une grosse perte de revenus mais il m’a toujours encouragée.

Un petit hommage à Jean Fradin qui est décédé depuis et qui était un super prof.

Un immense merci à Lauranne Saliaris d’avoir partagé un peu de son histoire. J’espère qu’elle vous donnera envie de continuer à chercher jusqu’à ce que vous trouviez votre voie ! Et à aider vos jeunes à ne pas désespérer s’ils ne savent pas à 18 ans ce qu’ils veulent faire 😀

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